Tout commence par une semi-plaisanterie, qui devrait m'expédier à Marne-la-Vallée ; on en débouche sur Château-Thierry, grâce à quoi on fait, bien entendu, une allusion à La Fontaine. Là-dessus, par une sorte de capillarité littéraire, on commande chez Price Minister le livre que Marc Fumaroli – qu'on a aimé par le passé à cause de (ou grâce à) Chateaubriand – a consacré au fabuliste poète. Et le livre arrive. Il est accompagné de la feuille rituelle, que l'on appelle, je crois, un récapitulatif de commande, comme il y en a chaque fois. Mais, là, il y a un ajout de l'expéditeur, à l'encre bleue, à droite de la feuille, qui dit ceci :
« Merci Didier pour votre commande et… bonne lecture de cet ouvrage qui a appartenu à Madeleine Milhaud, comédienne, metteur en scène, femme de lettres et épouse du grand compositeur français Darius Milhaud ! »
Donc, d'une manière certes fort ténue, mon existence vient, pour une poignée d'euros, de rejoindre celle de Darius Milhaud. J'en ai ressenti une sorte de début de vertige. Le livre de Fumaroli est paru en 1997, Milhaud était mort depuis 23 ans (m'apprend Wikimachin). J'ignorais qu'il fût marié, et donc qu'il eût une veuve. Mais, soudain, cette femme, Madeleine, prend consistance dans ma vie, et je me surprends à manier plus délicatement les pages de ce livre que je ne le ferais d'un autre.
J'aime beaucoup cette histoire. Je vous imagine feuilletant délicatement les pages de ce livre livre.
RépondreSupprimerJe l'aime beaucoup également. Et, en plus, ce livre livre est de Fumaroli Fumaroli, qui est un merveilleux critique critique.
SupprimerAh Fumaroli ! : Son Paris New York aller retour, regard sur l'art contemporain est remarquable et très éclairant sur les enjeux de l'art depuis la fin de la seconde guerre mondiale ; je le conseille.
RépondreSupprimerJe vais commander ça, tiens !
SupprimerJe connais très bien Darius Milhaud Darius Milhaud. C'est le nom du lycée de Bicetre qui s'est rendu célèbre quand un jeune lycéen noir a été tué il y a un an ou deux.
RépondreSupprimerS'agissait-il d'un noir noir ? Car, en ce cas, ils étaient peut-être deux, et alors ça devient un meurtre de masse, presque un génocide.
SupprimerMoi, par l'intermédiaire de Priceminister, j'ai reçu un livre ayant appartenu à Vercingétorix. La seule remarque que je me suis faite est qu'il était assez abimé. Déçu...
RépondreSupprimerjard
D'autant qu'à l'époque les livres étaient en pierre et que ç'a dû vous coûter bonbon en frais d'envoi.
SupprimerMais Priceminister livre vite... au galop roman.
SupprimerMajeur
Ah, la sensibilité des réacs réacs... C'est pas un progressiste qu'on verrait verrait trembler d'émotion devant des pages pages, même si elles ont appartenu appartenu à Bakounine Bakounine ou Lajoinie Lajoinie.
RépondreSupprimerEncore que l'idée de posséder un livre de Lajoinie peut avoir quelque chose de vertigineusement séduisant.
SupprimerJ'en profite pour vous dire que votre dernier livre est un bel bel objet. Le gris gris de la couverture est très mode mode (désolé)
RépondreSupprimerJe ne savais pas que c'était tendance ! En fait, je me suis inspiré des Exorcismes spirituels de Muray, aux Belles Lettres.
SupprimerTout ça nous vaut, au milieu de votre bruit et de votre fureur, un moment très doux doux.
RépondreSupprimerTrès doux, très doux, n'exagérons rien !
SupprimerUn jour, j'ai trouvé chez un bouquiniste, sur un marché, un livre d'art dans une édition de vulgarisation de belle tenue, genre la peinture en trois volumes. A l'intérieur était encore la facture, d'un montant probablement respectable pour l'époque puisqu'à régler en trois versements, établie par le représentant au nom de l'acheteur, exerçant la profession de coiffeuse, à Paris, sur les Champs-Elysées, dans les années cinquante.
RépondreSupprimerJ'ai failli négocier la facture seule, et puis je suis allé acheter mes poireaux.
Du moment que vous avez pensé aux poireaux, il vous sera beaucoup pardonné.
SupprimerJe gage que vous allez apprécier le chapitre où Fumaroli recense les scènes des Mémoires d'outre-tombe qui sont pastichées dans La recherche (sauf si vous connaissez déjà tout cela, évidemment)...
RépondreSupprimerIl les recense dans son livre sur La Fontaine ?!?
SupprimerZut, mince, ça m'apprendra à lire le billet un jour et le commenter un autre jour. Je croyais que vous veniez d'acheter celui sur Shatteredbrain.
Supprimer"A mon libraire, disait le poète, je dois plus que le prix de l'encre et du papier".
RépondreSupprimer@Robert
Vous avez-eu, je l'espère, la présence d'esprit de mettre dans des sacs différent le livre et les poireaux,
l'odeur de ces légumes imprègne le papier!
Majeur
différentS, bien sur.
SupprimerMajeur
C'est bien beau tout cela mais moi j'attends avec impatience votre recension du "Mariage de Chiffon" !
RépondreSupprimerOh la la, ma pauvre ! Cette malheureuse Gyp est enfouie sous une pile de livres, à peu près tous plus tentants qu'elle, et je crains qu'il ne vous faille attendre encore…
SupprimerMadeleine Milhaud occupe une grande place dans la vie artistique du XXe siècle.
RépondreSupprimerElle a connu Debussy et tous les grands noms d'avant 14.
Mariée à Darius en 1925, ils s'iinstallèrent dans un appartement du boulevard de Clichy où elle mourut en 2008 à l'âge de 105 ans.
Les musiciens (compositeurs et interprètes) du monde entier lui ont rendu visite.
Elle a fait de nombreuses émissions de radio -en qualité de productrice ou d'invitée- des années 40 aux années 2000.
Durant la guerre elle intervenait dans les émissions françaises de l'antenne officielle américaine (aux côtés d'A Breton ou de Julien Green)