L'expérience est curieuse, et diablement spatio-culturo-temporelle : vous êtes occupé à relire Les Caractères de M. de La Bruyère ; c'est tôt le matin, nul bruit encor. Vous tombez sur cette phrase : « On n'a pas dans le cœur de quoi toujours pleurer, de quoi toujours aimer. » Aussitôt, du silence, monte la voix d'Édith Piaf, qui chante ceci. Vous vous rendez compte que jamais, hormis par le cousinage plaisant de leurs deux noms, vous n'auriez songé à associer l'un de ces personnages avec l'autre. Pourtant, à l'orée des années soixante, un parolier de chansons l'a fait ; sans rien en dire à personne, probablement.
Il y a des mots d'auteur, comme ça, qui sonnent spontanément comme une chanson. Tiens, celui-là par exemple : "parce que c'était lui, parce que c'était moi".
RépondreSupprimerMais c'est assez rare. La formule de Kant, par exemple, "Aie le courage de te servir de ton propre entendement", eh bien, ça doit être coton à mettre en musique.
Déjà, le fait que ce ne soit ni un octosyllabe, ni un alexandrin, ça n'aide pas…
SupprimerIl doit en effet y en avoir beaucoup, de ces citations dissimulées dans les replis des chansons.
RépondreSupprimeret que ça tombe pile poil sous vos yeux et dans votre oreille, moi je dis que c'est de la chance cosmique, ou un message. Un message de qui ? Eh bien, du Grand Tout qui vous demande d'avoir une gentillesse, une attention, ou pourquoi pas de faire un super cadeau à votre Irremplaçable. On a bâti des chapelles votives pour moins que ça.
RépondreSupprimerOh oui, oui un super cadeau !
SupprimerMais tu l'as, ton super cadeau : la chanson de Piaf mise en lien…
SupprimerOh ! la ! la ! Je préfère aller commencer à lire Le Chef d'œuvre...
RépondreSupprimerC'est beaucoup plus long et, en plus, les phrases de riment même pas.
SupprimerCher parrain,
SupprimerQuand je vois que vos admirateurs en sont à écrire des billets dithyrambiques sur la couleur de la couverture de votre Chef d'œuvre, je me dis que, arrivée à la page 20, je dois absolument trouver une critique fondée, ne serait-ce que pour donner quelque valeur à ces compliments qui ont commencé à déferler sur vous.
Vous connaissez la remarque stupide de Salieri : "Trop de notes, mon cher Mozart !" Eh bien voilà, vous lisant, je me suis dit : "Trop de mots, mon cher Didier !"
Pour vous donner un exemple, page 20, vous écrivez la phrase suivante :
"Il aurait dû le comprendre dès les premiers mots, en entendant la voix transformée de Jonathan, plus grave, plus profonde, comme si la testostérone avait pris le contrôle de ses cordes vocales." 32 mots !
Alors que j'eusse préféré :
"Il aurait dû le comprendre dès les premiers mots en entendant la voix soudain plus grave de Jonathan, dont la testostérone avait pris le contrôle." 25 mots !
J'espère que vous ne m'en voudrez pas d'avoir essayé de vous démontrer que si les auteurs ont un style d'écriture, les lecteurs ont un style de lecture ! D'autant que cela ne vous empêchera en rien de devenir le Mozart de la littérature. Et c'est, en tous cas, tout le mal que je vous souhaite.
Quant à moi, je vais continuer la lecture du livre de ce parrain dont, je dois le dire, je suis très fière.
Je savais que cette fucking page 20 n'allait pas, je le savais, bon sang !
SupprimerBravo pour Montcosson ! Il s'agit en effet d'Orléans, mais pas de l'actuelle : plutôt celle des années 70 telle qu'elle subsiste en ma mémoire.
SupprimerBon, alors, puisqu'on en est à la critique négative du livre ( mais il faut vraiment se forcer, parce que j'ai beaucoup aimé) : votre côté réac ( est-ce la réalité ou un rôle de composition ? Je renonce à le savoir) vous pousse parfois à aller trop loin et à tomber dans la facilité (un peu comme votre dernière phrase de votre billet de blog sur Mantes) : autant la partie sur la manif " Je suis Jackie!" est drôle, autant le petit passage sur la pièce de théâtre nègre en peul non sous-titré est banale et facile : personnellement, je l'aurais supprimée dans les prochaines éditions.
SupprimerC'est une chanson écrite par Nita Raya (sur une musique de Charles Dumont).
RépondreSupprimerOn en apprend des choses, sur ce blog ! Je reviendrai…
SupprimerTrès intéressant cet article sur Nita Raya dont, à ma grande honte, j'ignorais jusqu'à l'existence. Didier a dû apprécier la plastique de la belle Nita, lui qui trouve les femmes musclées peu attirantes !
SupprimerEst-ce une allusion à la chanson de Jean Sablon ( écrite pour lui par Trenet ,je crois ) "Vous, qui passez sans me voir "? Il y a-t-il une citation cachée ?
RépondreSupprimer... Et vous vous êtes souvenu de cette phrase dans la chanson.
RépondreSupprimerElle a dû drôlement vous marquer pour la replacer chez son propriétaire presque 50 ans plus tard.
Bravo
hélène dici
C'est le propre des chansons, de se graver ainsi. Et puis, il m'arrive (quand Catherine n'est pas là, qui la déteste…) de récouter Piaf…
Supprimer"J'ai le plus beau des papayous lélés qu'on ait jamais vu dans l'quartier" comme chantait Carlos, c'est tiré de La Recherche, non ?
RépondreSupprimerJ'aurais plutôt vu Montaigne, personnellement…
RépondreSupprimerQuant à la chanson de Jean Sablon, il s'agit en fait de l'adaptation par Trenet d'une vieille complainte russe : Vous qui m'passez l'samovar.
RépondreSupprimer...qui eszt de Francis Blanche !
RépondreSupprimer" C'est la profonde ignorance qui inspire le ton dogmatique. Celui qui ne sait rien croit enseigner aux autres ce qu'il vient d'apprendre lui-même."
RépondreSupprimerUne phrase de La Bruyère qui pourrait être vôtre, et quand on connait l'amour que vous portez à cette chanteuse, on ne peut qu'apprécier ce billet.
La gravure que vous avez choisie pour l'illustrer est très jolie !
Jolie coïncidence : dans le chapitre de La Bruyère lu ce matin au lever, figurait justement cette phrase que vous citez.
SupprimerJe suis allée lire et franchement, connaissant cette "élite", je m'attendais à pire ! Quant à la phrase que vous citez, d'autres ont su dire plus élégamment, c'est vrai, que le propre de l'art consiste en une apparente facilité.
RépondreSupprimerLa critique de monsieur Arié a un je ne sais quoi de "forcé", qui me laisse mi-figue mi-raisin.
RépondreSupprimerTout d'abord je suis quelque peu surprise par "la maigre retraite" d'un cardiologue. Mais bon....ce n'est pas le plus grave.
Mais parler d'auteurs narcissiques et élitistes et les opposer à la bonté d'âme d'un Zola ou d'un Hugo, qui n'auraient écrit que pour le "bon peuple" me laisse rêveuse...
" me laisse mi-figue mi-raisin"
RépondreSupprimerO9n est ce que l'on est : vous n'êtes ni entièrement figue, ni entièrement raisin, il faut en prendre votre parti.
@ Ariane
RépondreSupprimerMais notre élite impécunieuse n'a-t-elle pas revendiqué elle-même le fait d'avoir eu à se forcer pour critiquer le livre de Didier ? Alors pourquoi s'en étonner ?
Et pourquoi diable me serais-je forcé, alors que rien ni personne ne me le demandaient ? Non, non : je n'ai aucun livre en chantier pour lequel j'espère un retour d'ascenseur de M. Goux !
RépondreSupprimerCela me rappelle cette petite citation mnémotechnique pour retenir certains auteurs sous Louis XIV: " La Racine de la Bruyère Boileau de La Fontaine Molière"; j'ai quand même retenu quelque chose de mon passage au collège.
RépondreSupprimerVous l'avez retenu, mais tronqué : Une corneille perchée sur la racine de la bruyère boit l'eau de la fontaine Molière.
SupprimerC'était un mauvais professeur de français, c'est à cause de lui que je suis nul en orthographe.
SupprimerIl faut bien un coupable.
Justement Mildred, je n'aime pas qu'on se force, je suis pour le spontané, le naturel; ce qui vient au fil de la plume (comme dirait Léautaud)
RépondreSupprimerVous me direz que se forcer est peut-être dans la nature beaucoup.
@Elie Arié : je dois être un peu simplette, je n'ai pas compris le 09 qui débute votre phrase, est-ce un code ?
Et voilà qu'on s'éloigne du propos de Didier, et encore plus de celui de La Bruyère.