On inaugure, ce soir, mais en fait hier, un nouveau libellé (voir plus bas). Il s'agit de rendre compte de ce dont l'Irremplaçable et moi parlons entre six et sept (des fois huit, voire neuf), lors de notre apéro vespéral. Si je m'en souviens, il va de soit, et si c'est racontable.
Le temps de venir ici, de la maison principale, j'ai déjà évidemment oublié l'essentiel de ces conversations si fluides qu'elles coulent aussi vite que les gorgées de bière. Et c'est bien (on me comprendra) ce qui les rend précieuses, ce côté évanescent, à peine palpable. Néanmoins, je crois me souvenir que nous avons parlé de :
- Marcel Proust. Notamment de ses rapports nettement névrotiques à la médecine. J'expliquais à Catherine que, fils et frère de médecins "haut de gamme", ce connard aurait pu survivre ne serait-ce que deux ou trois ans de plus, et terminer vraiment La Recherche. Et que j'étais fort triste que non. Je ne dois pas être le seul : nombre de proustiens - et parmi eux de bien plus brillants que moi - doivent par moment rêver de remonter le temps à seule fin de bourrer Marcel d'antibiotiques ou de je ne sais quoi, pour le prolonger jusque 1925.
- Plus étonnant : j'ai dit, un moment, que nous devrions pourrir la vie de notre maire et tenter d'obtenir de lui qu'il éteigne ses putains de lampadaires de rue qui ne servent absolument à rien, mais que, pour cela, il faudrait envisager de nous inscrire sur les listes électorales. A ma grande surprise, l'Irremplaçable m'a annoncé qu'elle ne s'inscrirait jamais, parce qu'elle ne voulait juger personne. Devant mon air incompréhensif, elle m'a rappelé que sa soeur, pas longtemps avant, avait été réquisitionnée pour faire partie d'un jury d'Assises. J'ai eu beau lui dire que la "chance" était presque aussi énorme que de gagner au loto, elle est restée su ses positions. (Mais, bon, elle avait bu.)
- Avant, on avait causé de trucs plus légers, mais je suis en train d'oublier, et je n'ai pas envie d'aller lui demander, sinon, elle va me refaire chier avec ses conneries de tribunal.
- Ah ! si A un moment, on parlait de sports de combat, je me demande bien pourquoi. Si ! si ! ça me revient : à cause d'un documentaire extraordinaire que j'ai vu, il y a quelques mois, concernant les procédures de recrutement au GIGN. (Si ça repasse, je vous le conseille, vraiment.) Je me suis souvenu, à cette occasion, d'un sergent parfaitement imbécile (je m'en étais aperçu dès cette époque), que j'ai connu au collège militaire de Saint-Cyr ( mon témoignage est ici, cliquer sur "témoignages et interviews" et repérer mon nom...) et qui était une espèce de champion de Close Combat (à côté de ça, le karaté est un truc de bisounours bobos). Il impressionnait beaucoup les gamins de onze ans que nous étions, ce sergent au regard vide et au sourire niais, en donnant (à notre demande) de grands coups de poing dans les gros piliers en béton qui se trouvaient là.
Un jour, le même, réunissant ses trois neurones, avait réussi à produire un calembour dont il n'avait pas semblé peu fier et qui (si j'en juge avec le recul) nous avait évité la punition. Nous pinçant en train de fumer dans les chiottes (coup de bol : il aurait pu nous prendre à nous branler de conserve, ce que nous faisions à chaque occasion), il avait réfléchi une poignée de fractions de seconde. Puis ses lèvres minces (que je revois parfaitement) s'étaient étirées en un sourire, et, expirant la satisfaction de soi, il avait laissé tomber, avec son accent méridional à la con :
On les connaissait fumisteu... Les voilà fumeureu...
Il était tellement content de lui, qu'on a pu s'égailler sans le moindre dégât collatéral. Comme quoi le Close combat ne prépare pas forcément à toutes les épreuves de la vie. J'avais onze ans et demi lorsque j'ai été confronté à ce brave homme (je dis cela sans ironie : je suis presque certain qu'il était en effet un brave homme) : comment, à cet âge, ai-je vu qu'il était stupide ? Et, plus profondément, ai-je eu raison ? Était-il stupide ? L'est-il ?
Autre chose, plus troublante : tout cela se passant en 1967 ou 1968, ce sergent doit avoir environ 70 ans à l'heure où j'écris (je sais qu'il en avait 30, alors, il en était fier). Quel homme est-il devenu ? Que la vie a-t-elle fait de lui ?
Le temps de venir ici, de la maison principale, j'ai déjà évidemment oublié l'essentiel de ces conversations si fluides qu'elles coulent aussi vite que les gorgées de bière. Et c'est bien (on me comprendra) ce qui les rend précieuses, ce côté évanescent, à peine palpable. Néanmoins, je crois me souvenir que nous avons parlé de :
- Marcel Proust. Notamment de ses rapports nettement névrotiques à la médecine. J'expliquais à Catherine que, fils et frère de médecins "haut de gamme", ce connard aurait pu survivre ne serait-ce que deux ou trois ans de plus, et terminer vraiment La Recherche. Et que j'étais fort triste que non. Je ne dois pas être le seul : nombre de proustiens - et parmi eux de bien plus brillants que moi - doivent par moment rêver de remonter le temps à seule fin de bourrer Marcel d'antibiotiques ou de je ne sais quoi, pour le prolonger jusque 1925.
- Plus étonnant : j'ai dit, un moment, que nous devrions pourrir la vie de notre maire et tenter d'obtenir de lui qu'il éteigne ses putains de lampadaires de rue qui ne servent absolument à rien, mais que, pour cela, il faudrait envisager de nous inscrire sur les listes électorales. A ma grande surprise, l'Irremplaçable m'a annoncé qu'elle ne s'inscrirait jamais, parce qu'elle ne voulait juger personne. Devant mon air incompréhensif, elle m'a rappelé que sa soeur, pas longtemps avant, avait été réquisitionnée pour faire partie d'un jury d'Assises. J'ai eu beau lui dire que la "chance" était presque aussi énorme que de gagner au loto, elle est restée su ses positions. (Mais, bon, elle avait bu.)
- Avant, on avait causé de trucs plus légers, mais je suis en train d'oublier, et je n'ai pas envie d'aller lui demander, sinon, elle va me refaire chier avec ses conneries de tribunal.
- Ah ! si A un moment, on parlait de sports de combat, je me demande bien pourquoi. Si ! si ! ça me revient : à cause d'un documentaire extraordinaire que j'ai vu, il y a quelques mois, concernant les procédures de recrutement au GIGN. (Si ça repasse, je vous le conseille, vraiment.) Je me suis souvenu, à cette occasion, d'un sergent parfaitement imbécile (je m'en étais aperçu dès cette époque), que j'ai connu au collège militaire de Saint-Cyr ( mon témoignage est ici, cliquer sur "témoignages et interviews" et repérer mon nom...) et qui était une espèce de champion de Close Combat (à côté de ça, le karaté est un truc de bisounours bobos). Il impressionnait beaucoup les gamins de onze ans que nous étions, ce sergent au regard vide et au sourire niais, en donnant (à notre demande) de grands coups de poing dans les gros piliers en béton qui se trouvaient là.
Un jour, le même, réunissant ses trois neurones, avait réussi à produire un calembour dont il n'avait pas semblé peu fier et qui (si j'en juge avec le recul) nous avait évité la punition. Nous pinçant en train de fumer dans les chiottes (coup de bol : il aurait pu nous prendre à nous branler de conserve, ce que nous faisions à chaque occasion), il avait réfléchi une poignée de fractions de seconde. Puis ses lèvres minces (que je revois parfaitement) s'étaient étirées en un sourire, et, expirant la satisfaction de soi, il avait laissé tomber, avec son accent méridional à la con :
On les connaissait fumisteu... Les voilà fumeureu...
Il était tellement content de lui, qu'on a pu s'égailler sans le moindre dégât collatéral. Comme quoi le Close combat ne prépare pas forcément à toutes les épreuves de la vie. J'avais onze ans et demi lorsque j'ai été confronté à ce brave homme (je dis cela sans ironie : je suis presque certain qu'il était en effet un brave homme) : comment, à cet âge, ai-je vu qu'il était stupide ? Et, plus profondément, ai-je eu raison ? Était-il stupide ? L'est-il ?
Autre chose, plus troublante : tout cela se passant en 1967 ou 1968, ce sergent doit avoir environ 70 ans à l'heure où j'écris (je sais qu'il en avait 30, alors, il en était fier). Quel homme est-il devenu ? Que la vie a-t-elle fait de lui ?
Bon, je ne dirai plus rien ! Si c'est pour que tout soit raconté dans le monde entier ...
RépondreSupprimerLe monde entier, le monde entier... n'exagérons rien !
RépondreSupprimerEt puis, hein, si ç'arrive à te faire taire...
(Smiley !)
Ceux qui aiment les calembours et ont de bons souvenirs de parties de fumette/branlette vivent généralement très vieux ; s'ils ne sont pas immortels.
RépondreSupprimerIl y a un an ou deux (?) j'ai re-visité de fond en combles mon lycée de 68 (comme vous dites !)
Je suis même passé par les chiottes - où nous avions passé, mes camarades et moi tant d'heures glorieuses !
ET qu'y ai-je fais alors selon vous ?
J'ai pissé...
Mais... Il est né en 1902 l'auteur ou bien ? C'est quoi donc ces souvenirs de communales ?
RépondreSupprimerJe dis ça évidemment avec un respect certain, vu les antécédents de Close Combat !
Je me régale par avance de ces zapéros pourvues en guise de cacahouètes des bons mots de l'Irremplaçable et en guise d'ambroisie d'anecdotes littéraires...
RépondreSupprimer(Oui, bon, il est tard !)
Très tard en fait !
RépondreSupprimerAh ! Ces putains de lampadaires ! Chez nous, un "marchepied nouveau riche" a collé deux halogènes de 500w chacun pour éclairer sa verrue de portail : par voie diplomatique, j'ai réussi à les faire éteindre à 23 h. Ouf !
RépondreSupprimerVous avez dit "3 neurones" ? Le standart est mononeuronal dit "en battant de cloche" non ?
P.S. : élève brillant vous étiez , je n'en doutais pas !
Hier soir, coup de gueule et blues consécutif, j'ai failli raconter ici, à chaud, une altercation professionnelle surréaliste vécue une heure avant et puis le blues à enfoui tout ça dans les sédiments de mon âme Plutonesque... mais est-ce racontable ?
"Karate truc de bisounours bobos"...
RépondreSupprimerMouais.
Tu ne recules vraiment devant rien.
Bénédicte,
ceinture noire de truc de bisounours bobos,
prof diplomée d'état de truc de bisounours bobos,
arbitre de truc de bisounours bobos,
plusieurs titres en compétition de truc de bisounours bobos.
(dont une disqualification pour avoir provoqué une fracture de la machoire à l'adversaire de truc de bisounours bobos)
Leu Warou : j'aurais fait la même chose à votre place, je crois.
RépondreSupprimerMerlinbreizh : vous exagérez ! Si j'étais en sixième en 1968, n'est-ce pas...
Zoridae : ça commence mal : on vient de décider de passer trois jours à l'eau claire !
Pluton : j'aime beaucoup le mononeurone en "battant de cloche" !
Béné dicte : bon, bon, j'ai un peu exagéré, pour la beauté du contraste... Mais il est vrai que, par rappoirt au karaté qui possède, si j'ai bien compris, une sorte de code, de "philosophie", le close combat m'avait fait l'effet d'un truc fait uniquement pour terrasser l'adversaire, et point barre.
'Bisounours Bobos' m'a valu un gros gras rire au magasin, toute seule sur mon tabouret... J'espère que personne n'est passé à ce moment là... Pour ma réputation, comprenez... Enfin en même temps... au point où j'en suis...
RépondreSupprimerEt sinon, pour votre brave sergent, si ça se trouve, il est mort.... Excusez moi de vous annoncer la nouvelle si brutalement mais c'est quand même du domaine du possible...
Bon, je sors.
Pluton, ça me plaît bien cette image d'un seul neurone en forme de cloche. Et ceux qui sont vraiment cloche, ils ont quand même un neurone ?
RépondreSupprimerUn homme stupide n'aurait pas pu être brave...ou alors c'est qu'il avait seulement l'air studide... à cause de son accent méridional à la con peut-être... Enfin à mon avis.
RépondreSupprimerMais pourquoi l'unique neurone devrait-il être en forme de cloche ? Et d'abord, ne résonne t-on pas mieux avec un tel neurone :-)?
bbl : le neurone c'est le battant uniquement, la cloche étant la boite crânienne, vide of course...
RépondreSupprimerP.S. : mon accent est à moitié con car méridional peu prononcé...
Bénédicte : don't worry, je suis sûr que vous êtes très forte en close-combat aussi ; ))
bbl : et ça résonne effectivement très bien, d'ailleurs ces couillons là s'écoutent souvent parler... ; ))
RépondreSupprimerAh merci d'éclairer ma lanterne Pluton !
RépondreSupprimerP.S. : le mien n'est pas trop trop prononcé non plus, mais je suppose que ça ne le rend pas moins con pour autant :-)
Marcel Proust était assez moyen en close combat anti microbes faut croire. Comme quoi, l'orientation, c'est une question importante quand on est jeune et en pleine forme !
RépondreSupprimer:-)
Si la Recherche avait été terminée, il aurait retitré "la trouvaille" ? Ou "le brevet" ?
RépondreSupprimerEt pouquoi pas Eurêka ?
RépondreSupprimer(oublié de m'abonner, pardon !)
:-)
bbl et Pluton, : pour les accents, je passe l'éponge, mais tâchez de n'en abuser point...
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